L’unique briqueterie encore en activité dans les Pyrénées-Orientales, celle de Sainte-Marcelle, est installée à Saint-Jean-Pla-de-Corts depuis 1926. Spécialisée dans la production semi-artisanale d’une centaine de modèles de terre cuite, elle perpétue un savoir-faire familial inspiré du XVIIIe siècle fortement inscrit dans le paysage architectural du territoire.

L’unique briqueterie encore en activité dans les Pyrénées-Orientales, celle de Sainte-Marcelle, est installée à Saint-Jean-Pla-de-Corts depuis 1926. Spécialisée dans la production semi-artisanale d’une centaine de modèles de terre cuite, elle perpétue un savoir-faire familial inspiré du XVIIIe siècle fortement inscrit dans le paysage architectural du territoire. Dans les années 1970, elle revitalise la conception du cayrou, brique de grandes dimensions, actuellement perçu comme le modèle de référence du bâti traditionnel catalan.

Toutes les étapes de fabrication sont prises en charge in situ : de l’extraction de l’argile à la cuisson dans un immense four Hoffmann. Plus de six mois de travail sont nécessaires à la production annuelle d’un millier de tonnes principalement composée de briques de différents formats mais également de pièces sur mesure parfois usées artificiellement. L’entreprise conserve ainsi son caractère d’innovation et d’adaptation en créant des produits spécifiques pour les Monuments historiques.

Depuis le début du XXe siècle, le lieu accueille également des artistes, parfois de renommée internationale, qui y font cuire leurs œuvres.

Cette pratique, enfin, est liée aux savoirs multiples des briquetiers : celui de la terre, de la maîtrise de son façonnage et des subtilités de la cuisson. Elle est complétée par l’expérience de la mise en œuvre d’un matériau traditionnel, indissociable de la connaissance de l’architecture vernaculaire.

La pratique de la terre cuite, de sa fabrication à ses usages constructifs, repose sur trois catégories d’acteurs :

 

● Les détenteurs des savoir-faire de la fabrication : les propriétaires et gestionnaires de la briqueterie Sainte-Marcelle de Saint-Jean-Pla-de-Corts, les employés actuels comme les anciens ouvriers et la famille Fite-Colomines dans son ensemble, soit une vingtaine de personnes.

● Les utilisateurs, qui mettent en œuvre les éléments de terre cuite : les professionnels du bâtiment, de l’architecture, du conseil en architecture et en restauration du patrimoine, soit une centaine d’entreprises et cabinets concernés dans le département des Pyrénées-Orientales. Ce groupe concerne également les particuliers qui restaurent eux-mêmes leurs propriétés, viennent faire leurs commandes directes à la briqueterie ou ont des exigences en termes d’emploi de matériau artisanal auprès des maîtres d’ouvrage. Cela peut également être le cas des commanditaires principaux que sont les 120 communes concernées par la présence de cayrous sur leur zone géographique.

● Les « créateurs » : les sculpteurs et céramistes qui font cuire leurs œuvres dans le four de la briqueterie, mais aussi les photographes et autres artistes inspirés par les lieux (environ une douzaine par an), auxquels il faut ajouter les personnes passionnées par ce produit traditionnel, notamment pour son aspect décoratif et sa valeur culturelle, représentées par environ 200 associations de valorisation du patrimoine à l’échelle du département.

La spécificité des dimensions et de la mise en œuvre des cayrous fait que la zone géographique concernée est surtout celle des Pyrénées-Orientales, excepté les espaces de haute montagne, moins concernés par la présence de l’argile.

Lieu(x) de la pratique en France

 

Saint-Jean-Pla-de-Corts et l'ensemble du département des Pyrénées-Orientales.

 

 

Pratique similaire en France et/ou à l’étranger

 

La fabrication et l’usage de la terre cuite architecturale sont répandus partout dans le monde depuis plusieurs siècles, voire des millénaires.

La France est actuellement l’un des premiers producteurs de terre cuite industrielle au monde, le premier au niveau européen pour la fabrication des tuiles. Seule une soixantaine de structures métropolitaines fonctionnent encore de manière artisanale ou semi-artisanale.

L’unique briqueterie encore en activité dans les Pyrénées-Orientales est celle de Sainte-Marcelle à Saint-Jean-Pla-de-Corts. Elle est la seule en France à poursuivre la fabrication d’une brique locale communément nommée cayrou.

Dans ce même département perdure également la production de terre cuite architecturale émaillée (tuilerie Pujo à Saint-Feliu-d’Avall).

La présence de terres argileuses, leur diversité, ainsi que les contraintes topologiques et climatologiques qui rendent nécessaire l’usage de matériaux de construction résistants font que la terre cuite est très présente dans le bâti des Pyrénées-Orientales. Caractérisée par ses coloris et ses formats, avec la permanence d’une brique de grandes dimensions, le cayrou, la terre cuite roussillonnaise est aussi marquée par le particularisme de sa mise en œuvre qui donne toute sa spécificité au bâti local.

Cette présence de terre cuite architecturale sur le territoire repose sur un ensemble de savoir-faire qui peuvent être regroupés en trois catégories correspondant respectivement aux différentes terres et à leurs usages, au séchage et à la cuisson, enfin à l’adaptation du produit et à sa mise en œuvre.

Ces savoir-faire sont aujourd’hui largement perdus. Sur l’ensemble du Roussillon, seule la briqueterie Sainte-Marcelle à Saint-Jean-Pla-de-Corts les maintient encore. Elle poursuit, en effet, une production de tradition ancienne, modernisée au début du XXe siècle, qui a subi peu de modifications depuis et qui se poursuit grâce à la compétence de trois briquetiers.

 

 

1. Une fabrication libre et maîtrisée

 

« C’est un art de fabriquer cette brique. » Jean Fite

Les différentes étapes de fabrication sont réalisées au sein même de la briqueterie. Les dimensions imposantes et la commodité des bâtiments ainsi que la libre propriété des terrains d’extraction de l’argile permettent aux briquetiers de maîtriser toute la chaîne opératoire. Le procédé initial date de la fin des années 1920 et a été modifié dans les années 1950 : il reste, depuis, quasiment identique.

Cinq étapes principales sont nécessaires dont l’une, primordiale, concerne le choix de la terre.

 

 

* La sélection et l’extraction de l’argile

 

« L’argile a toutes les couleurs du monde. » Franck Denaclara

La carrière d’argile est située aux lieux-dits Soula de l’Armada et Mata Lloberes dans la commune de Vivès, à 2 km de la briqueterie. Ce site d’extraction d’environ 4 ha, issu de formations géologiques du Pliocène marin, a la particularité d’offrir une grande variété d’argiles. Elles sont ici qualifiées de « terres plus ou moins grasses », plus ou moins pierreuses, parfois caractérisées par l’absence de galets. Cette diversité apporte à la fois des avantages et des inconvénients. Elle permet une grande liberté, une multiplicité de réalisations, parfois inédites. Parallèlement, il est nécessaire de changer régulièrement de filon pour trouver celui correspondant à la production souhaitée : un quart seulement de la carrière est donc actuellement exploité. Le choix de la bonne argile va conditionner celle du matériau de construction final. Ainsi, pour fabriquer des cayrous, il est préférable d’utiliser de la terre « maigre mais douce » c’est-à-dire une argile riche en silice et peu plastique. La qualité de celle-ci peut se deviner à sa texture mais également, selon certains ouvriers, à son odeur. Une certaine « subtilité de l’odeur » permet de déterminer si elle est adéquate à sa future destination. L’extraction est tributaire des conditions météorologiques et se fait de préférence en période estivale. La production annuelle est d’environ 1000 tonnes.

Si nécessaire, l’argile peut subir in situ une période de pourrissage d’un à six mois durant laquelle l’humidité, la pluie et le gel vont améliorer son élasticité.

 

 

* La préparation de la matière première

 

Les blocs d’argile extraits de la carrière sont transportés jusqu’à la briqueterie où ils sont affinés.

 

Affinage ou épuration

L’argile brute est alors grossièrement épurée : elle est d’abord épierrée puis émottée par un « désagrégateur » situé dans un hangar extérieur. Elle est ensuite triée et broyée avant d’être acheminée par un élévateur vers un espace de stockage relié à des distributeurs. L’argile, volontairement maintenue humide, est conservée dans un lieu sombre, propice à la prolifération de bactéries et à l’élimination naturelle des débris organiques présents dans la matière première. Ici, la terre n’est ni réduite en poudre ni complètement épurée. Les impuretés sont en partie délibérément conservées afin d’augmenter la densité des briques pleines.

 

Malaxage

Au moment de la fabrication, la terre est acheminée par un tapis roulant vers un humidificateur puis pétrie dans un malaxeur afin d’obtenir une pâte compressée. L’argile étant déjà humide, il n’est pas nécessaire d’ajouter une grande quantité d’eau. La maîtrise de l’humidification est d’importance. Cet ajout se fait sans instrument de contrôle, simplement en fonction du toucher de la matière par le briquetier.

 

* Le façonnage

Extrusion Lorsque la fabrication est mécanisée, la pâte obtenue est façonnée selon les besoins dans une mouleuse découpeuse. Elle est propulsée par une vis sans fin vers une filière, une pièce métallique sous forme d’orifice, qui génère la transformation de la pâte en ruban. Une centaine de filières différentes sont à disposition.

Coupe La pâte est ensuite coupée à l’aide d’un fil d’acier à une fréquence réglée en fonction de la longueur souhaitée. Le briquetier est en permanence présent à la sortie de la découpeuse afin d’en contrôler le fonctionnement, d’attraper les produits finis et de les déposer sur des casiers de stockage. Il met éventuellement de côté les pièces dont l’aspect ne serait pas satisfaisant. Après ce façonnage, la terre est encore flexible. Ce qui reste est réutilisé impliquant l’absence de déchet à cette étape de la fabrication.

Pour la réalisation de certains produits (comme les tomettes par exemple), l’utilisation d’une presse manuelle permet d’obtenir la découpe complémentaire souhaitée.

 

Le sur-mesure et les finitions manuelles

En fonction des commandes, la pâte d’argile, une fois extraite de la malaxeuse, peut être complètement travaillée à la main afin d’obtenir la forme exacte souhaitée : on parle alors de « pâte molle ». Elle est transvasée dans des moules en bois existants ou réalisés sur mesure. Le briquetier remplit le gabarit en commençant d’abord par les angles puis arase l’excédent à l’aide d’une planche. Afin de faciliter son dégraissage, la terre est mélangée avec une légère quantité de sable de rivière ou de poussière d’argile cuite. Le mouillage et le sablage préalables du moule ainsi que l’ajout d’une arase de sable rend le démoulage plus aisé. Des traces de doigts présentes sur les pièces finies témoignent de l’utilisation de cette technique.

Lorsque la forme du modèle désiré est plus complexe, le façonnage peut être mixte : en partie complété à la main. Ainsi, le modèle dit « trèfle » ou « Monaco », destiné aux claustras ou aux balustrades, est fabriqué en trois étapes. Une première coupe quadrangulaire est faite à la machine puis le passage sous presse permet d’imprimer la forme d’un trèfle. Enfin, une nouvelle découpe à l’intérieur du modèle s’effectue à la main avec un gabarit adapté.

Quelle que soit la technique initiale de fabrication, les pièces peuvent également être sablées, leurs angles lissés à la main afin de leur donner un aspect vieilli ou irrégulier. L’usure artificielle peut se faire sur une ou plusieurs faces en fonction de l’utilisation future. Une barbotine, une pâte d’argile très délayée, est parfois ajoutée afin d’obtenir un effet patiné. Ces finitions manuelles permettent également une meilleure tenue de la pièce.

Les châssis remplis des produits façonnés sont ensuite transportés jusqu’aux hangars de séchage.

 

* Le séchage naturel

 

« Un séchage vraiment à cœur nécessaire. » Franck Denaclara

Cette étape, primordiale, consiste à éliminer une partie de l’eau présente dans les pièces moulées précédemment (environ 30 % du poids en eau). Cette phase se déroule dans de grands bâtiments, larges et ouverts, conçus pour faciliter les courants d’air. Elle est conditionnée par le climat local caractérisé par un vent de nord-ouest, sec et régulier, présent à toute saison : la tramontane. Il permet une évaporation superficielle parfois rapide de l’ordre de 24 heures. Le séchage sous abri ouvert, uniquement naturel, nécessite environ 6 mois d’attente (qui peut être réduite à 4 mois en période estivale).

Les produits moulés sont placés selon un mode d’installation particulier. Ils sont d’abord déposés de manière empirique, les hauteurs des piles étant limitées à une hauteur d’homme pour des raisons pratiques mais également dans un souci d’uniformisation. Les faces en contact avec l’air ne doivent pas sécher trop rapidement. Pour éviter un retrait trop immédiat et la fragilisation des briques, celles-ci doivent être « séchées à cœur ». Si ce séchage n’est pas complet, les pièces risqueraient de prendre trop de volume à la cuisson. Au bout d’une semaine environ, elles sont empilées dans des étagères métalliques pour gagner de la place et augmenter la surface de séchage. Selon leur poids, leur dimension et leur forme, elles sont installées de manière différente. Des briques cuites peuvent être posées sur certains éléments plus fins pour éviter qu’ils ne se voilent. Lorsque c’est le cas, on parle alors que « ça tuile ». Cette étape de séchage, nécessairement lente et progressive, est essentielle pour la qualité finale du produit et la limitation des pertes. Quoique longue et délicate, elle ne nécessite pas de maintenance particulière. La date de mise en séchage est contrôlée grâce à des inscriptions manuelles à la craie sur les palettes et grâce au toucher. Lorsque les pièces sortent facilement des châssis, c’est que le séchage est suffisant.

 

* La transformation par la cuisson

« Observer la transformation de la brique et les couleurs qu’elles prenaient, c’est magique. » Félix Etogo

C’est la phase la plus importante qui va déterminer la réussite de plusieurs mois de travail et de patience. La cuisson a lieu dans un four industriel Hoffmann qui présente un système à foyer mobile actuellement alimenté au fuel lourd par la partie haute du dispositif.

 

Enfournement

Le chargement du four nécessite beaucoup de manutention et une habileté manuelle puisque les produits à cuire sont rangés et empilés selon une disposition très précise afin de faciliter la circulation homogène de l’air chaud entre les différentes pièces et éviter les pertes et les voilages. Les briquetiers évoquent la notion de « flux » (« comme de l’eau »), de circulation, de feu qui doit pouvoir se frayer un passage par tous les interstices. Pour obtenir ce résultat, il existe un montage particulier pour chaque type de pièce. Les produits plus lourds et volumineux sont placés sur le sol en terre battue. Les briques, par exemple, sont posées de champ par cinq et appareillées en alternances, chaque rang étant délimité par des assises horizontales. Chaque pièce est séparée de l’autre par un espace correspondant au passage de la main du briquetier. L’ensemble occupe au maximum le volume de la galerie. Au sol, trois passages parallèles aux murs d’une hauteur approximative de 40 cm et d’une largeur de 20 cm sont aménagés afin de faciliter la circulation du feu. Différentes rangées de produits, autrement appelées tables ou ici « blègues », sont installées tous les 80 cm environ afin de créer des corps de chambres de combustion. Ces derniers correspondent à la distance entre les rampes à injection situées sur le toit du four. Un caillou lancé depuis chaque trou des injecteurs permet de repérer l’espace correspondant.

Dans une petite galerie perpendiculaire, sont installées les autres pièces proposées à la cuisson : ces dernières sont de dimensions réduites ou des œuvres artistiques parfois protégées selon des dispositifs proposés par les créateurs concernés.

Les deux galeries principales du four, actuellement utilisées, peuvent contenir environ 300 tonnes de pièces.

Lorsque le four est rempli à son maximum, les quatre entrées sont maçonnées avant la cuisson. Les murs temporaires de briques creuses cuites liées par du mortier d’argile et couvertes d’une feuille de papier gras empêchent l’air de circuler rendant ainsi l’intérieur étanche.

 

Chauffe

Le four est alimenté par des injecteurs reliés à des brûleurs déplacés par les ouvriers lors de la cuisson qui se déroule en continu. Ces derniers évoluent sur le dessus du four accessible par une rampe. Les cinq brûleurs de chaque injecteur sont déplacés progressivement d’un bout du four à l’autre formant un déplacement en forme de U. Le système nécessite plusieurs heures de préchauffage à 450 °C pendant environ 7 heures avant la chauffe principale de 7 à 8 heures à près de 1000 °C. La température, comme la durée de la cuisson, peuvent être variables en fonction des pièces à cuire. Ainsi, certains éléments nécessitent une cuisson à 800 °C, les cayrous à 980 °C. La température maximale est atteinte en plusieurs paliers, les seuils étant contrôlés par des cannes pyrométriques. L’allumage est facilité par l’inflammation d’un tas de bois disposé au-dessus de la porte maçonnée de la première galerie. Un système de ventilation par des gaines permet l’activation de la chauffe et apporte de l’air frais nécessaire au refroidissement. Enfin, une turbine évacue les gaz de combustion par un conduit souterrain menant à la cheminée extérieure au bâtiment.

Les briquetiers parlent d’une « atmosphère » particulière du four. Celle-ci n’est pas paradoxalement déterminée par la sensation de chaleur mais pas le bruit sourd de l’inflammation et le cliquetis des mécanismes. Durant son temps de contrôle, y compris la nuit, le briquetier doit être en permanence à l’écoute de ce système. Il doit non seulement contrôler les températures et les durées de chauffe, déplacer les injecteurs en fonction de l’avancée de la cuisson dans les galeries, procéder à l’alimentation en carburant mais également détecter et réparer les pannes mécaniques éventuelles. Régulièrement, l’ouvrier observe par les trous des injecteurs l’intérieur du four, l’avancée de la cuisson et le déplacement possible des pièces. Il connaîtra par avance les écroulements éventuels et peut déterminer la réussite de la cuisson selon l’emplacement dans la galerie. C’est un four qui a près d’un siècle et qui a subi des transformations qui ont pu le fragiliser, les parties anciennes étant les mieux structurées et les mieux conservées. Lorsqu’il est complètement refroidi, des réparations, essentiellement des colmatages au mortier d’argile, sont menées afin d’assurer l’étanchéité complète du dispositif.

Environ deux jours sont nécessaires pour le préchauffage, cinq à sept jours en continu pour la cuisson et jusqu’à cinq jours pour un refroidissement progressif qui évite la détérioration des produits. Cette période est non seulement contraignante mais également préoccupante. La réussite de la cuisson, forcément hétérogène et aléatoire, est en partie liée au bon empilement préalable des pièces et, surtout, aux conditions climatiques. Ainsi, si l’air est humide, la combustion perd en efficacité, la tramontane améliore le tirage.

La gestion des étapes de séchage ou de cuisson se fait donc en fonction des conditions météorologiques locales qu’il est nécessaire de connaître : « le nez sur le Canigó », le pic situé à proximité servant d’indicateur naturel.

 

Défournement et tri

Une fois la porte maçonnée temporaire détruite, les pièces sont défournées en commençant par la première galerie à avoir été chauffée. Celles-ci sont alors triées entre produits sans imperfection et produits présentant des défauts. Les premiers sont classés en premier choix. Les briques bien cuites sont repérées à leur couleur, d’un rouge bien franc et à leur son. Elles sont dites « coulées » lorsqu’elles se sont déformées à la cuisson. Celles qui sont fêlées, ébréchées, pas assez cuites ou, au contraire, carbonisées sont mises en deuxième choix. Il faut trois mois pour charger et décharger le four progressivement.

Les produits sont ensuite entreposés dans une partie des hangars ou sur l’esplanade du bâtiment principal. En plus des lots commandés, un stock permanent de briques pleines considérées comme les « pièces spécifiques de l’endroit », en l’occurrence les cayrous, est constitué.

En comptant le temps optimal de séchage, l’enfournement, le défournement ainsi que la durée de la cuisson, neuf mois peuvent être nécessaires pour fabriquer une pièce de terre cuite avec ce processus semi-artisanal. La production a lieu toute l’année même si la nature-même de l’activité est liée à la saisonnalité. Ainsi, les petites pièces sont plutôt conçues l’hiver car le gel risquerait de provoquer des délitements sur des plus volumineuses. La période estivale est idéale pour la réalisation des pièces plus importantes et le séchage. Quant aux cuissons qui ont lieu deux à trois fois par an en fonction de la demande, elles se font plutôt au printemps et à l’automne afin d’économiser du combustible.

strogn>2. Un modèle référent : le cayrou

« Une brique à la sauce catalane. » Félix Etogo

Son étymologie fait référence à un élément quadrangulaire : du catalan cairó signifiant carreau. L’orthographie cayrou correspond à une version linguistique roussillonnaise. Elle désigne une brique de terre cuite pleine, un parallélépipède rectangle de grandes dimensions, généralement de 44 x 22 x 5 cm. Il existe plusieurs déclinaisons de cette brique nommées ici la barcelonina ou petite rajola (28 x 14 x 2 cm), la grande rajola (44 x 22 x 3 cm) ou le maó (28 x 14 x 4,5 cm). Les dimensions annoncées restent approximatives car la fabrication artisanale génère une certaine irrégularité. Elles ont été réglementées dès l’époque de Louis XVI. Mais leur production a été supplantée après-guerre avec le développement de la brique creuse. La concurrence de nouveaux matériaux, l’industrialisation et la standardisation de la fabrication ont alors engendré la disparition de celle du cayrou : sa présence dans la construction locale a donc été renouvelée dans l’histoire récente. La revitalisation de sa fabrication traditionnelle a eu lieu dans les années 1970 par le biais du briquetier de Sainte-Marcelle.

C’est, depuis, devenu un terme générique désignant un produit de terre cuite locale, dit traditionnel. Caractérisé pas sa couleur : un rouge orangé intense, il est considéré comme un produit patrimonial, un « produit noble » que l’on a tendance à redécouvrir et à « découvrir » en laissant apparent ce qui ne l’était pas forcément auparavant. La fabrication artisanale, ainsi que le caractère aléatoire de la cuisson, engendrent effectivement une variété chromatique remarquable des produits. La qualité originelle de l’argile utilisée (qui possède ici plus d’oxyde de fer) donne une couleur rouge franche extérieure (plus orangée à l’intérieur). Le cayrou, c’est, dit-on, non seulement une couleur mais également une texture, poreuse, irrégulière au toucher qui va avoir tendance à légèrement noircir avec le temps. Cette texture est due à son caractère artisanal mais aussi à l’aspect brut de la matière première dans laquelle aucun ingrédient n’est ajouté. Les briques actuelles sont plus denses qu’autrefois et sont encore plus solides même si elles restent gélives. Le poids final d’un cayrou est actuellement de 10 kg (soit une perte de 1 à 2 kg par rapport à son poids avant la cuisson) contre 7 à 8 kg auparavant.

 

 

3. Une forte présence dans l’architecture vernaculaire

« Le cayrou, c’est très pratique. » Franck Denaclara

Par ses propriétés et son faible coût de fabrication, la terre cuite est un matériau récurrent de l’architecture locale. Elle peut être utilisée par petites touches, jouer un rôle esthétique et structurel pour les chaînes d’angle, les encadrements des baies et les décorations de façade ou être placée en rangs entre deux couches de maçonnerie. Enfin, sauf exception en haute montagne, les couvertures sont en tuiles canal.

Son emploi s’est généralisé à partir du XIXe siècle pour la construction de maçonneries mixtes composées d’hourdis de galets roulés soulignés d’assises de cayrous disposées tous les 40 à 50 cm. Afin d’accélérer la prise du mortier, relativement longue, de réduire la quantité utilisée et d’absorber l’humidité qu’il contient, des morceaux de terre cuite, parfois associés à du mâchefer, y sont insérés. L’incrustation de ces éléments forme parfois des dessins sous forme de lignes courbes, de cercles ou de spirales ou représentent des dates ou des initiales. Les chaînes d’angle sont également composées de hampes de 4 ou 5 cayrous disposés de champ en alternance. La dimension de ces pièces est idéale car proportionnelle aux maçonneries, leur longueur réglant l’épaisseur usitée des murs.

Pour l’habitat noble ou bourgeois, des enduits couvrants à vocation ornementale, protégeant du froid et de l’humidité, autrefois synonymes d’aisance financière (pour leur coût de fabrication et leur niveau de technicité), étaient utilisés. Ces enduits à la chaux ou au mortier de tuileau peuvent délibérément masquer une partie des parements et des briques.

Le climat méditerranéen a engendré la généralisation des couvertures en tuiles canal maçonnées. Un modèle identique, avec une légère variation des dimensions, est utilisé pour les courants et les couverts. Les toitures sont composées de deux couches de tuiles inversées, la partie la plus large des pièces étant toujours placée vers le haut dans le sens de la pente. Les rives peuvent aussi être composées de tuiles placées l’une sur l’autre ou de briques pleines dépassant du mur de quelques centimètres. Les faîtages sont également en terre cuite comme le sont parfois les souches des cheminées. Certaines coiffes de cheminée dites « à la catalane » sont assemblées avec des cayrous posés de champ eux-mêmes couronnés de briques posées à plat formant une pente et reliées par une tuile faîtière. Résistantes au vieillissement, les couvertures en tuiles canal artisanales offrent un jeu de couleurs dégradées et patinées qui participe au paysage architectural. L’esthétique des façades et des toitures est renforcé par la diversité des débords de toiture, sous forme de corniches maçonnées composées de tuiles et de briques alternées ou seulement de tuiles canal (on parle alors de « génoise ») dont les rangs varient en fonction de la hauteur de la façade. Elles composent un décor original encore fortement présent sur le territoire.

À l’intérieur des édifices, on trouve de la terre cuite pour des éléments structurels (piliers, cloisons), décoratifs (comme des plafonds rustiques) et les sols : carreaux dites rajoles ou tomettes. Depuis l’époque médiévale, s’est développé un type de voûtement dit « à la catalane ». Légères et montées sans cintre, elles sont généralement composées de solives peu espacées réunies par des petites voûtes en berceau ou en arc surbaissé.

La terre cuite est également le matériau adéquat par sa qualité de résistance au feu pour la réalisation de divers édicules utilitaires comme les puits ou les fours.

Que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur des constructions, à vocation utilitaire et/ou d’ornementation, apparent ou enduit, ancien ou contemporain, la terre cuite architecturale, très présente, participe au caractère du bâti du territoire. Ce dernier respecte la logique des ressources et des conditions topologiques et climatologiques, variables sur ce même territoire, en milieu urbain ou rural. Il n’y a donc pas de modèle de référence identifié mais une spécificité régionale de l’architecture à laquelle le produit de terre cuite artisanale, le cayrou en particulier, participe fortement.

 

 

4. Une production diversifiée

La variété du gisement d’argile et la possibilité du sur-mesure permettent une production très diversifiée avec 120 modèles recensés.

Parmi ceux-ci, la briqueterie réalise encore, essentiellement sur commande, différentes formes de tuiles dont les romaines (50 x 20 cm) plus délicates à réaliser que les tuiles canal. Elles sont constituées de deux parties : les tegulae qui sont plates avec des rebords et utilisées pour les sous toitures et les imbrices de forme convexe.

Environ 5 % de la production est consacrée à du sur-mesure d’après d’anciens modèles, des échantillons ou des dessins originaux. Par exemple, des carreaux de sol spécifiques ont été recréés pour la restauration de l’ermitage Notre-Dame-du-Coral à Prats-de-Mollo-la-Preste dans les années 1990 d’après l’un des originaux. Une terre de couleur différente a été insérée sur les angles de chaque pièce afin de former un motif floral une fois les quatre carreaux regroupés. En 2009, ont été spécifiquement réalisés pour la toiture de la cathédrale Saint-Jean-Baptiste de Perpignan 40 tuiles de grandes dimensions employées pour l’évacuation des eaux pluviales. Ces tuiles faîtières autrement dites « gruo » mesurent près d’un mètre de long et pèsent approximativement 35 kg chacune. Un procédé spécial a dû être inventé pour remplir la commande de 40 exemplaires.

La production est d’un millier de tonnes par an : dalles et tomettes pour le sol, tuyaux de descente, pare feuilles ou plaquettes, diverses sortes de tuiles, éléments de toiture, de claustras en forme de trèfle ou de feuille d’acanthe mais également différents modèles de briques dont la référence du bâti régional : le cayrou.

 

 

5. De la restauration des Monuments historiques aux aménagements contemporains

Le renouveau de la production ainsi que la réalisation de produits sur mesure à partir d’échantillons a permis d’orienter l’activité de l’entreprise, et indirectement sa survie, vers la fourniture de matériaux destinés à la restauration des monuments protégés.

Ainsi, le premier chantier de restauration notable est celui de l’hôtel particulier d’Ortaffa à Perpignan (classé MH), actuelle annexe de la préfecture, restructuré en 1970. Une partie de la façade a été refaite en briques apparentes sans l’enduit initial.

La briqueterie a également fourni des matériaux pour d’autres bâtiments classés de Perpignan comme le palais de Rois de Majorque, l’église des Dominicains, le couvent des Minimes, le Campo Santo ou cloître-cimetière de la cathédrale Saint-Jean-Baptiste.

Plus récemment, l’entreprise a œuvré à la restauration de la Rotonde, l’amphithéâtre d’anatomie de l’ancienne université du XVIIIe siècle, construit en briques et renduit au mortier de tuile.

D’autres monuments du département ont été restaurés comme les églises de Baixas et de Villeneuve-de-la-Raho, le cloître de Saint-Génis-des-Fontaines ou le fort Libéria à Villefranche-de-Conflent. Ce dernier est un exemple d’architecture bastionnée du XVIIe siècle inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco au titre du Réseau des sites majeurs de Vauban. La qualité de ces produits s’étend bien au-delà du département puisque la briqueterie a fourni des matériaux pour la restauration de la cathédrale et de la chapelle des Pénitents bleus de Narbonne (1995), de la cathédrale de Clermont-Ferrand et même de celle d’Albi (également bien de l’Unesco).

Le Château rouge de Conflans à Albertville (Savoie) et celui de Lagrézette à Caillac (Lot), restauré à partir des années 1980, ont bénéficié du savoir-faire de l’entreprise.

Cette dernière a participé activement à la réalisation d’un chantier d’envergure : celui de la villa Torre-Clementina (classée MH) à Roquebrune-Cap-Martin. Cette résidence de 1904, construite par l’architecte Lucien Hesse, et son jardin ont été restaurés dans les années 1990.

Les produits de terre cuite sont aussi d’actualité en tant que matériau qualifié représentatif du territoire pour un certain nombre de réalisations comme le Village catalan, la dernière aire d’autoroute avant l’Espagne, réplique d’un centre villageois construit dans les années 1970, ou la Mutualité sociale agricole à Perpignan en 2007. D’autres édifices publics mettent en avant le cayrou par le biais de certains détails, tels les piliers du lycée Arago de Perpignan ou la salle culturelle dite de l’Union à Céret.

Certaines entreprises de maçonnerie et, surtout, une majorité de particuliers, acquièrent ces produits pour différents travaux de restauration et de décoration dans des maisons particulières ou pour des aménagements paysagers (dallages, jardinières…). Ils manifestent un attachement certain pour le respect des matériaux d’origine et pour le retour à une certaine authenticité. Ces matériaux sont également mis en œuvre à la demande des communes comme celle de Saint-Jean-Pla-de-Corts, par exemple, pour la réhabilitation récente de son centre ancien. Si la distribution se fait actuellement dans le Grand Sud, les dimensions particulières du cayrou font que la demande départementale prédomine.

Enfin, depuis les années 1920, la briqueterie fait l’objet d’une demande originale régulière de la part des artistes, parfois renommés, qui profitent de la cuisson dans un grand four pour finaliser leurs œuvres de grandes dimensions. Ce mode de cuisson hétérogène, aléatoire, même s’il comporte une part de risque, offre surtout la possibilité de nuances et d’un résultat plastique très esthétique. Malgré l’attente entre chaque cuisson (environ 6 mois) et la réactivité nécessaire à l’annonce de la prochaine chauffe, il y a, par an, encore une douzaine de créateurs actuels qui font appel aux services de la briqueterie.

Alors qu’une production importante nécessitait autrefois une manutention conséquente spécialisée (jusqu’à une trentaine d’ouvriers), seulement trois briquetiers sont actuellement les détenteurs de la pratique avec des tâches très polyvalentes. Le gérant est le plus sollicité des trois puisqu’il se charge également de l’extraction et de la recherche de nouveaux filons dans la carrière ou de la création ou réfection des moules. Il gère la cuisson en binôme avec le contremaître, présent dans l’entreprise depuis une vingtaine d’années. Le dernier ouvrier, incorporé plus récemment, s’occupe plus précisément de la manutention. Lorsqu’une commande est plus spécifique, notamment lorsque des pièces doivent être usées artificiellement, tout le personnel est réquisitionné y compris la gérante, habituellement chargée de la gestion.

Le français majoritairement.

Certaines expressions ou dénominations sont empruntées à la langue catalane, version roussillonnaise essentiellement.

Patrimoine bâti

 

La briqueterie est installée depuis 1926 sur son emplacement actuel, un ancien terrain viticole. Ce site, judicieusement choisi, répond à différents critères nécessaires au développement de l’activité :

● une surface plane et spacieuse indispensable pour l’implantation de grands bâtiments et la création d’un four Hoffmann intérieur.

● l’éloignement d’autres bâtiments contre les risques d’incendie.

● une bonne exposition au vent (orientation sud-ouest / ouest-est). La tramontane est ici plus forte qu’ailleurs.

● la proximité de l’argilière et d’un approvisionnement en eau.

● des liaisons routières (et ferroviaire lors de l’installation).

La superficie du bâtiment, terminé en 1928 et agrandi dans les années 1960, est vaste : près de 1000 m2. L’intérieur est compartimenté entre les zones d’exposition-vente, celles de fabrication et celles du séchage. Ainsi, les parties destinées au façonnage et à la cuisson sont d’une hauteur imposante répondant ainsi aux dimensions nécessaires pour les machines et le four Hoffmann ainsi qu’aux besoins de ventilation lors des cuissons.

Les bâtiments pour le séchage sont beaucoup plus bas et aérés. À l’ouest, un hangar abrite le mécanisme de broyage relié à l’intérieur du bâtiment par un élévateur.

La charpente du bâtiment principal est soutenue par des piliers en cayrous surmontés d’une immense charpente de bois, dont certains éléments proviennent de la réutilisation des cintres d’un ancien pont de la commune.

La principale cour de stockage (où sont empilés les lots des différents produits ainsi que les ratés) est dominée par une cheminée de 30 m de hauteur construite en briques réfractaires sur une base extérieure quadrangulaire de 4 m de largeur. Cette cheminée aurait dû être plus basse et accolée au bâtiment mais le terrain de son emplacement initial s’est avéré trop instable pour la dimension projetée. Elle se trouve donc à une vingtaine de mètres de l’édifice et est reliée au four Hoffmann par un conduit souterrain. Elle sert de repère pour l’entreprise comme pour le village (dont le centre est à proximité), notamment lorsque la fumée qui s’en échappe signale une cuisson en cours.

À l’ouest et au nord des bâtiments principaux, cinq maisonnettes à vocation d’habitat ouvrier ont été construites dans les années 1960. L’une d’entre elles sert actuellement de bureau.

 

 

Objets, outils, matériaux supports

 

Si une partie de l’extraction, de la préparation de la terre et du façonnage ont été mécanisées dans les années 1950, les objets et les outils nécessaires à la fabrication des produits de terre cuite restent peu élaborés et, surtout, quasiment identiques à ceux utilisés lors du façonnage à la main décrits dans les ouvrages anciens notamment ceux du XVIIIe siècle.

● Ainsi, deux planches de bois suffisent à manipuler les produits à la sortie de la mouleuse.

● La briqueterie possède encore de nombreux châssis et outils en bois destinés au façonnage en particulier des tuiles (certains sont autrement dits « reposoirs »).

● Le nombre de modèles étant conséquent, il existe une multiplicité de moules en fer et tungstène ou en bois. Ces derniers peuvent être refaits régulièrement in situ par le gérant lui-même en fonction des besoins et des commandes.

● Les produits finis peuvent porter l’empreinte de l’entreprise par le biais d’un marquage réalisé avec un tampon en fonte datant d’après-guerre représentant le nom « Sainte-Marcelle » entouré d’un ovale. Ce marquage est alors réalisé à la main avant l’opération de séchage et de cuisson dans le four Hoffmann. Mis au point par un ingénieur autrichien dans les années 1860, ce système, datant ici de 1928, permet le déplacement du foyer à travers une structure à l’origine en forme d’anneau. Les entrées principales permettent l’enfournement et le défournement des pièces dans les trois galeries actuellement utilisées : deux parallèles de 35 m de longueur chacune et une perpendiculaire de 5 m de long. Chaque galerie porte un nom lié au territoire : « Canigou », « Aspres », « Vallespir », « Albères » et le « Canigoulin ».

Une transmission d’abord familiale

 

« J’y suis né à la briqueterie. » Jean Fite

Comme cela pouvait être déjà le cas autrefois dans les petites unités de fabrication, la transmission du savoir-faire, et de l’entreprise elle-même, est essentiellement familiale. Ainsi, Jean Fite, né en 1928, a repris la gestion de l’entreprise lorsqu’il avait une vingtaine d’années à la suite de ses parents. Terrain de jeu de son enfance, comme celui de tous les descendants de la famille, il en appréciait l’ambiance et a toujours eu envie d’y travailler. Petit déjà, il gérait les factures avec sa mère qui les lui dictait. Assurant par la suite les tâches polyvalentes de gestion, de commercialisation et de fabrication, il y a travaillé avec son père jusqu’à la mort de ce dernier comme son père l’avait fait avec son grand-père. Lui-même a continué son activité tardivement et y retourne très régulièrement. Il est aussi le lien entre deux femmes : sa mère qui a fortement contribué à son rayonnement et sa fille cadette, Marcelle Denaclara, qui y est employée depuis 1990 et qui lui a succédé. Les deux sont d’ailleurs liées par le port du même prénom à l’origine du nom de la briqueterie dans les années 1920.

Comme les autres membres de la famille Fite-Colomines, détentrice de la pratique, il exprime sa fierté d’avoir pu conserver l’entreprise et de l’avoir maintenue depuis au moins huit générations. Comme les artisans d’autrefois qui exerçaient plusieurs métiers, la gérante actuelle continue d’ailleurs d’exploiter les vignes familiales tout en assurant la gestion générale de l’entreprise et en participant à la fabrication lorsque cela s’avère nécessaire, notamment pour l’activité de sablage à la main, apprise in situ.

 

Les savoirs du briquetier acquis par l’expérience

L’Institut national des Métiers d’art (INMA) recense le métier de briquetier dans sa liste officielle. Selon l’organisme, il n’y a pas de formation initiale à cette profession, même s’il existe des formations de durée variable avec délivrance d’un certificat de qualification professionnelle. Depuis 2005, il en existe deux : celui de « conducteur d’installations tuiles et briques » et celui de « préparateur de la terre ». Ces certificats permettent de faire reconnaître des compétences et un savoir-faire au sein d’une branche professionnelle en l’occurrence au sein de la Fédération française des Tuiles et des Briques (FFTB). Le nombre limité de délivrance (1 par an en moyenne pour le préparateur de la terre) et sa valeur non diplômante (même s’il correspond à un niveau de qualification depuis janvier 2019) ne concordent pas avec la réalité du terrain de la fabrication artisanale. Ainsi, l’apprentissage des savoirs se fait « sur le tas », un certain nombre de techniques s’acquérant avec l’expérience. Les gérants, comme les deux ouvriers actuels, ont donc été formés sur place : du « patron » au gérant, de l’ancien contremaître au nouveau, entre ouvriers. Ces tâches sont également marquées par une forte polyvalence et sont dépendantes des conditions climatiques. Même si les ouvriers ne mentionnent pas la difficulté ou la technicité de leur métier, ils ont pourtant acquis un savoir par l’expérience et une manière de travailler avec les éléments, apprise sur le terrain et oubliée dans les modes de production industrielle, « où l’on ne touche plus la terre ». Les quatre éléments naturels : la terre, l’eau, le feu et l’air sont nécessaires à la fabrication de la brique, auxquels on pourrait adjoindre un cinquième : le briquetier lui-même qui va participer à leur assemblage et les mesurer. Cette mesure se fait essentiellement de manière sensitive « à l’œil et au toucher » par la manipulation directe, la majorité des étapes de fabrication se faisant encore à la main.

Ce travail « prend son temps » et offre la possibilité de maîtriser le processus par la connaissance intime de celui-ci. Œuvrer pour un produit de qualité, reconnaissable, dont l’utilisation même, par ses spécificités et ses irrégularités, requiert aussi un certain savoir-faire qui complète celui du briquetier.

 

La sensibilité et la connaissance des commanditaires

Le briquetier actuel, Franck Denaclara, ancien collaborateur d’architecte ayant travaillé dans la région toulousaine, est dans l’entreprise depuis 1999. Il a apporté un savoir-faire technique précieux notamment dans le rapport avec les usagers concernant l’utilisation de ces produits uniques, loin d’être uniformes. Il est parfois sollicité par les architectes dont le rôle est primordial dans le choix des matériaux à utiliser en particulier sur les chantiers de restauration. Ces derniers peuvent préconiser l’utilisation de matériaux de récupération ou de fabrication artisanale en tenant compte des propriétés de ces derniers.

 

Le savoir-faire de la mise en œuvre <p<« Une brique traditionnelle a toujours un sens. » Franck Denaclara

Les techniques de mise en œuvre de ces matériaux sont d’importance. Ainsi, le maçon ou l’utilisateur doit savoir reconnaître à l’achat le bon lot de briques avec les meilleures pièces, appréhender leur variabilité, notamment la porosité de chaque pièce, afin de l’utiliser à bon escient. Les meilleures briques, les plus cuites, sont utilisées pour les baies et les structures par exemple. Le niveau de cuisson va donc déterminer l’emplacement final sur le bâtiment. Ce dernier est déterminé par le son qu’elle produit : ainsi une brique bien cuite sonne clair. Les couvreurs avaient autrefois l’habitude de sonder les tuiles avec leur truelle avant la pose, afin d’écarter le cas échéant celles qui étaient fêlées. Le degré de cuisson engendre une variabilité des pièces en termes de résistance. Les moins cuites peuvent être ainsi plus friables, gélives ou sensibles à l’érosion et doivent être utilisées en conséquence.

Une brique traditionnelle et une brique moderne ne se posent pas de la même manière. Les traces sur la pièce liées à la position pendant la cuisson vont déterminer le sens de la pose. L’emploi systématique d’un liant de qualité en épaisseur réduite garantit un bon assemblage. Le jointement doit se faire selon les règles d’appareillage adéquates et de manière régulière avec une épaisseur entre 10 et 15 mm pour les joints horizontaux et de l’ordre de 10 mm pour les verticaux. Le mortier de chaux, fait avec du sable local, doit se rapprocher le plus possible, par sa couleur et par ses propriétés du liant ancien : il convient donc d’utiliser de la chaux naturelle. Par rapport à la contrainte du temps de séchage du mortier et afin d’éviter une surcharge, le maçon ne peut effectuer qu’une seule assise de maçonnerie mixte par jour, soit deux harpes de quatre cayrous. On disait autrefois qu’une assise de 50 cm correspondait à une journée de travail.

La tâche de ce dernier, comme celle du couvreur, est complexifiée par les contraintes liées à un matériau traditionnel dont le choix-même de la pièce et la pose nécessitent un apprentissage particulier. Ces connaissances s’acquièrent par la transmission directe, l’observation du bâti et par l’expérience.

Trois catégories de praticiens sont concernées par la transmission: en priorité les détenteurs des savoir-faire de la fabrication de la terre cuite mais également ses usagers, du commanditaire au maçon en passant par l’architecte, et les artistes qui vont y trouver un processus de création.

Deux organismes peuvent être affiliés à ces catégories :

 

La Fédération française des Tuiles et Briques et les organismes afférents

Depuis 2003, les entreprises concevant ou faisant concevoir des produits en terre cuite sont redevables de la taxe « Terre cuite » qui correspond à 0,40 % de leur chiffre d’affaires hors taxes. Cette taxe est uniquement destinée à financer les travaux du Centre technique des Matériaux naturels de construction (CTMNC), qui réalise des recherches sur les procédés, les matériaux, leur utilisation et leur mise en œuvre.

 

 

Les Compagnons du Devoir

« Le compagnonnage, réseau de transmission des savoirs et des identités par le métier » est inscrit depuis 2010 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.

L’usage de la terre cuite est ancien sur le territoire riche en gisements d’argile et d’eau. Les premières mentions de ce matériau, originaire du Moyen-Orient il y a environ 5000 ans, date ici de l’arrivée des Romains au IIe siècle avant J.-C. Quelques vestiges témoignent de son utilisation comme une partie des thermes d’Amélie-les-Bains. Dans cette commune, comme à Elne, ont été repérées des traces de fours antiques avec des estampilles de tuiliers.

L’emploi des briques se perd avec la chute de l’Empire romain et prend de l’ampleur avec la construction d’édifices de prestige à Perpignan au XIIIe siècle. Le palais des Rois de Majorque associe la brique au galet et à la pierre de taille. Le Castillet, témoin des fortifications du XIVe siècle, présente, quant à lui, un parement de briques. La céramique est également intégrée à l’intérieur des constructions : au niveau des sols, des plafonds ou sous forme d’éléments dans les voûtements. Des travaux récents ont mis à jour des exemples d’une pratique en usage dès la période antique et de manière relativement répandue en Europe. Des récipients en terre cuite, de formes diverses, de remploi ou non, sont insérés sous la toiture dans le but d’économiser les matériaux et, surtout, d’alléger les structures. C’est le cas d’une chapelle (fin XIVe) de l’église Saint-Jacques.

À la moitié du XVe siècle, les grands chantiers disparaissent au profit de constructions plus utilitaires. L’usage de la brique et du galet roulé peut alors apparaître comme un succédané à la pierre taillée, d’un coût plus élevé. La forteresse de Salses est un exemple d’emploi de la brique destinée à amortir le choc des projectiles. À la suite du traité des Pyrénées de 1659, à l’origine de la frontière actuelle avec l’Espagne, les fortifications bastionnées par Vauban vont généraliser l’emploi de ces parapets à des fins de défense. Au siècle suivant, dans le cadre des aménagements commandités par le maréchal de Mailly se développent les décors de façades en terre cuite à Perpignan. Le nombre d’unités de fabrication à proximité des carrières et, surtout, des édifices à construire se multiplie alors. L’artisan prépare la terre façonnée à la main. Les pièces sont cuites soit à l’air libre soit dans des foyers provisoires.

 

Au XIXe siècle, son emploi se développe dans l’habitat traditionnel. Liée à l’arrivée du chemin de fer, l’industrialisation du territoire entraîne la restructuration des fabriques qui se modernisent. Les briqueteries et les tuileries se concentrent là où il y a des gisements d’argile de qualité, comme à Perpignan, Thuir, Millas, Elne, Céret jusqu’à Saillagouse. En 1816, 35 structures sont mentionnées dans une vingtaine de communes du département. Cent dix ouvriers sont concernés par cette activité saisonnière de six mois avec une exploitation annuelle par établissement de 100 à 150 m3 de terre. Dix de ces unités se trouvent dans l’arrondissement de Céret. Les briques du château d’Aubiry, conçu par le danois Dorph-Petersen à partir de 1893, sont issues de trois de ces établissements : Elne, Céret et Saint-Jean-Pla-de-Corts. Les plus importantes entreprises du département, dont Chefdebien à Perpignan, prospèrent au moins jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, avant de subir la concurrence des nouveaux matériaux. En effet, l’emploi du béton, la fabrication à grande échelle puis la crise pétrolière signent le déclin progressif de la fabrication de la terre cuite dont le cayrou. Alors que 8 entreprises étaient encore en activité dans le département en 1952, il n’en reste qu’une seule en 1979.

La briqueterie Sainte-Marcelle est donc le dernier témoin d’une activité autrefois florissante, cette dernière étant de tradition ancestrale. Les briquetiers actuels revendiquent leur entreprise comme « étant la plus vieille du département » à avoir conservé sa production d’origine, même si la forme a évolué. En effet, la mention la plus ancienne est celle de Michel Colomines, « teuler » à Saint-Assiscle à Perpignan en 1735. En 1756, la confrérie des « thuiliers » de la même ville mentionne 14 membres, dont 3 nommés Colomines. Vingt ans plus tard, Vincens Colomines en est le trésorier. En 1812, il existe 5 fabricants principaux, dont le plus important est Pierre Colomines, qui dirige 9 ouvriers, soit 3 fois plus que les autres unités. En 1877, le mariage entre Joseph Colomines et Marie Farré, originaire du Vallespir, signe l’installation de l’entreprise près de Céret. Celle-ci est reprise, selon l’usage, par le fils aîné du couple, puis par la fille de ce dernier : Marcelle, née en 1907. Celle dont le prénom est à l’origine du nom de la briqueterie épouse Jean Fite, qui donne une nouvelle dimension à l’entreprise en la transférant à son emplacement actuel. En 1926, en effet, de nouveaux bâtiments sont construits à proximité de la gare, qui permet d’acheminer les produits finis et d’importer le charbon pour la cuisson. Il y a là la volonté de créer une briqueterie moderne, alimentée à l’électricité et munie d’une installation avec un four Hoffmann, mis en service deux ans plus tard.

Durant la Seconde Guerre mondiale, l’activité est stoppée malgré la relance provisoire avec des réfugiés espagnols dans le cadre de l’organisation du travail à l’extérieur des camps. Elle connaît une reprise à plein régime après-guerre à l’occasion de la reconstruction notamment en Normandie, grâce à de la main-d’œuvre espagnole et algérienne. C’est également la période de la mécanisation : l’achat d’un camion facilitant les transports d’argile et les livraisons et de machines encore utilisées actuellement permettent une production en continu jusque dans les années 1960. Le four à charbon est alimenté sans interruption (« un tour par semaine »), afin d’économiser la chaleur et fabriquer en grande quantité. Jusqu’au début des années 1970, 40 tonnes de briques creuses et de tuiles étaient fabriquées par jour, 50 tonnes mensuelles de charbon nécessaires et une trentaine d’ouvriers présents. Ce nombre diminue avec le passage à l’alimentation du four au fuel lourd. Le choix de reprendre la fabrication du cayrou, abandonné au moment de la diffusion de la brique creuse, a permis le maintien de la briqueterie qui s’est notamment spécialisée dans le domaine de la restauration des Monuments historiques et le sur-mesure. Cette brique, actuellement considérée comme emblématique, n’a, en réalité, plus été fabriquée durant une trentaine d’années.

 

 

La première mention du terme pour un édifice religieux daterait du XIIIe siècle. Dans un article du Bulletin monumental de 1913, Albert Mayeux évoque, au sujet de la reconstruction de l’église Saint-Jean le Vieux à Perpignan, l’emploi pour le voûtement de

« briques plates de 0m44 x 0m22 et 0m04 d’épaisseur, dites grands cayrous, que nous voyons employer ici pour la première fois ».

Au XVIIIe siècle, l’augmentation importante des prix engendre la mise en place d’une réglementation. Ainsi, l’ordonnance royale du 20 octobre 1713 fixe les tarifs des matériaux dont celui des « cairons ». Un arrêt du Conseil souverain du Roussillon datant de 1786 ajuste la fabrication à Perpignan et dans ses alentours, en fixant les dimensions des différents produits, en obligeant les briquetiers à déposer les matrices des moules au greffe de la police et à poinçonner leurs réalisations. Ils doivent également utiliser de la terre de qualité sans ajout de gravier et de sable. C’est la première initiative de normalisation, dans l’objectif de limiter les fraudes et de faciliter l’appareillage. La construction à partir de ces matériaux peut être très détaillée, comme dans le devis de réparation des bâtiments de la fonderie de l’Académie militaire de Perpignan en 1751 : « Toutes les briques qui seront employées dans la construction des murs auront 16 pouces de longueur 8 pouces de largeur et 2 pouces d’epesseur, appellées cayrons en termes du païs, bien cuites et sonnantes. ».

Malgré ces tentatives de standardisation, à la suite de nouveaux abus, la préfecture des Pyrénées-Orientales signe, en 1806, un arrêté d’application des ordonnances préalables avec une extension à l’ensemble du département.

Dans les années 1920, un aide-mémoire mentionne six sortes de cayrous destinés à la grosse maçonnerie dont les « comprimés », les « mécaniques » et les « ordinaires ».

 

 

La mise en valeur de ce matériau et son installation dans le paysage urbain du Roussillon datent de cette période : les murs ont tendance à être décrépis et son usage est « ré-inventé » dans le cadre de mouvements architecturaux qui prennent une dimension locale particulière. Certains quartiers de Perpignan, labellisés « Patrimoine XXe », constituent un terrain d’expérimentation exceptionnel pour ces innovations aux multiples influences en marge des courants français : entre emprunts au Modernisme catalan et au Régionalisme roussillonnais. L’un de ces promoteurs, Édouard Mas-Chancel, réalise à Perpignan dans les années 1930 une quinzaine d’édifices en mêlant inspirations historiques et méditerranéennes. En 1935, il énonce dans la revue Lo mestre d’obres l’un de ses principes : « Exprimons notre attachant profond pour notre sol par l’utilisation de matériaux extraits de ce sol même et qui vieillissent si bien. »

En 1974, lorsque les Autoroutes du Sud de la France commandent une œuvre pour le passage frontalier du Perthus au barcelonais Ricardo Bofill, celui-ci conçoit une pyramide. Cet ensemble monumental, de près de 80 m de haut, emprunte à la fois au langage architectural classique et à un répertoire plus autochtone. Le drapeau catalan y est symbolisé par l’emploi de briques sous forme de bandes de deux couleurs : le rouge et le jaune.

Depuis la fin du XIXe siècle, se met en place progressivement une culture régionale représentée par ses créations artistiques, son patrimoine et ses principes de restauration, se voulant un assemblage singulier. La brique, à travers le cayrou, participe à cette construction culturelle.

La plupart des étapes de fabrication se fait encore à la main ou, en tout cas, avec l’exigence d’un contrôle et d’une maîtrise humaines. Afin de répondre à des exigences commerciales et de rentabilité, une partie du procédé a été mécanisée dans les années 1950 avec l’achat de machines. Celles-ci, encore utilisées, n’ont connu, depuis, que des modifications tenues (une pompe à vide a été ajoutée sur l’extrudeuse par exemple afin de rendre la terre plus homogène). L’extraction et la manutention sont actuellement facilitées par l’usage de pelleteuses.

La croissance de la période des Trente Glorieuses a nécessité une modification des conditions de chauffe. Ainsi, l’alimentation et le plan du four Hoffmann, au départ tournant, ont été modifiés dans les années 1970, juste avant la crise pétrolière. Deux galeries demi-circulaires permettaient auparavant une cuisson en continu évitant ainsi une déperdition de chaleur et facilitant le maintien d’une température constante. L’alimentation se faisait grâce à de la poussière de charbon, ce qui rendait nécessaire la présence de nombreux tâcherons. Le passage à l’alimentation au fuel, encore d’actualité, a permis de réduire les coûts et de compenser la perte, plus récente, de main-d’œuvre.

Ces améliorations correspondent à une période où la concurrence industrielle se développe et nécessite une adaptation aboutissant ici au choix de la relance d’un matériau traditionnel avec le modèle du cayrou.

Ce modèle local correspond à la tradition d’une architecture vernaculaire qui, même s’il peut exister des dérogations, est soumise aux normes françaises et européennes ainsi qu’aux exigences environnementales en termes de fabrication et d’usage des matériaux dans les constructions neuves ou les rénovations. L’exigence de ces normes concernant les matériaux de construction employés peut réduire le potentiel d’utilisation des produits artisanaux de terre cuite. L’évolution en matière de protection de l’environnement a abouti à la mise en place d’une véritable réglementation concernant l’autorisation d’exploitation des carrières jusque-là simplement soumise à un système déclaratif, ce qui a également influencé l’organisation de l’activité.

La normalisation du secteur, ainsi que l’évolution des pratiques et de la demande, ont engendré l’adaptation de la fabrication en matière de produits également. Ainsi, depuis une dizaine d’années, l’entreprise fabrique un cayrou « évidé » qui sert de parement et donne un aspect traditionnel à des constructions modernes tout en répondant aux normes parasismiques (du béton armé est ajouté au centre de la pièce).

De manière générale, le savoir-faire de la terre cuite participe à la vague actuelle de retour à des matériaux de construction naturels reconnus pour leurs atouts écologiques, leur salubrité et leurs propriétés de régulation.

Vitalité

 

La transmission familiale, le respect des méthodes traditionnelles ainsi que la passion qui anime les briquetiers ont engendré une longévité de l’entreprise et une permanence de son activité. Cette stabilité ainsi que le savoir-faire, unique sur le territoire, offre une grande visibilité à la briqueterie. Cette vitalité est renforcée par l’affectivité que les particuliers démontrent vis-à-vis de la brique traditionnelle.

 

 

Menaces et risques

 

L’absence de formation initiale ainsi que des conditions de travail difficiles fragilisent le métier de briquetier. C’est un travail physique nécessitant beaucoup de manutention : au moins 600 tonnes sont manipulées pour une cuisson sans compter le chargement des produits pour le moulage et le séchage. La polyvalence des tâches et le travail en plein air entraînent la difficulté de trouver une main d’œuvre qualifiée et motivée. Le nombre actuel d’ouvriers ne permet pas d’augmenter la production qui, au regard de la surface actuelle, pourrait être trois fois supérieure.

La production elle-même est soumise :

● au caractère aléatoire d’une production semi-artisanale astreinte aux aléas climatiques.

● à l’approvisionnement en une matière première adéquate et de qualité. La carrière exploitée par l’entreprise possède une grande variété d’argiles, ce qui la contraint néanmoins à la recherche continuelle de nouvelles sources dans le respect de la déclaration à la DREAL obligatoire tous les 5 ans.

● à la concurrence industrielle. Les productions à grande échelle permettent la mise sur le marché de produits pas forcément plus compétitifs en termes de tarifs mais conçus en plus grande quantité et avec des délais de fabrication beaucoup plus courts. Au moins 6 mois sont nécessaires pour la fabrication d’un cayrou. En une journée, une briqueterie industrielle fabrique le tonnage annuel de la production de Sainte-Marcelle.

● au caractère aléatoire de la demande. La vente se fait essentiellement à destination de particuliers sur un marché à échelle départementale voire régionale et forcément réduit à l’exportation. Les résidents d’origine étrangère sont fortement représentés dans cette clientèle locale. Ils offrent plus d’attention au patrimoine et restaurent avec un soin particulier des mas ou des maisons de village.

● à la standardisation des matériaux. Les contraintes de la normalisation s’opposent à l’irrégularité d’un produit traditionnel. Ces obligations ainsi que les délais de fabrication engendrent une baisse de la demande dans le domaine de la restauration notamment celle des Monuments historiques.

La pérennité de la pratique est également liée à celle de la construction dans le domaine des matériaux traditionnels. Ainsi, le savoir-faire de l’appareillage, de la découpe est de la sculpture des briques, auparavant détenus par les briqueteurs, a quasiment disparu.

Depuis une quarantaine d’années, l’apprentissage des techniques de mise en œuvre de ces matériaux n’est plus d’actualité dans le cadre des formations des maçons. Les anciens artisans qui détenaient ce savoir par l’expérience et par l’observation ont fait place aux jeunes générations qui ont appris d’autres techniques et ont pour préférence les matériaux et les liants plus récents, plus faciles d’utilisation et, surtout, plus conformes aux contraintes actuelles notamment en termes de rentabilité. La transmission du savoir-faire en maçonnerie traditionnelle disparaît au profit d’une standardisation à partir des produits industrialisés. C’est ainsi que se perdent ou se sont progressivement perdues les techniques de pose ou de décoration des corniches ou la connaissance des structures du bâti traditionnel.

Modes de sauvegarde et de valorisation

 

Les actions de médiation

 

● Les visites guidées

Depuis une quarantaine d’années, l’entreprise a l’habitude de recevoir des groupes. Étudiants, scolaires voire futurs professionnels du bâtiment sont amenés à découvrir le savoir-faire de la fabrication de la terre cuite guidés par les briquetiers eux-mêmes. Ainsi, le public majoritaire, celui des enfants en milieu scolaire, sont initiés par le biais de l’appel aux sens : entre le toucher de la pâte d’argile, la découverte des bâtiments et du procédé de fabrication. La visite peut se solder par le don de petits carreaux ou de cayrous, qui seront ensuite décorés et gravés par les enfants avant d’être cuits lors du prochain cycle de cuisson.

 

 

● Les expositions

L’ambiance particulière des lieux et de ses « jeux de lumière » favorise la création artistique comme celle des photographes. Ainsi, Charles Camberoque y a réalisé un reportage dans les années 1970, Suah Ars, étudiante à l’École supérieure d’art et de design de Marseille-Méditerranée (ESADMM) ou encore la créatrice Eydia plus récemment.

En 1998, Pascale Aguilhon, qui a cuit de nombreuses œuvres à la briqueterie, s’est associée à un autre céramiste Patrice Cailhavel et à deux photographes (Floriane Carbonne et Jean-Gérard Bernabeu) pour une exposition à l’École des Beaux-Arts de Perpignan intitulée « Terres cuites et photographies en hommage à la briqueterie Sainte-Marcelle ». Plus récemment, cette plasticienne a également travaillé avec la briqueterie sur un projet de réalisation de moulages de visages de descendants de la Retirada, l’exil espagnol de 1939, dans des cayrous.

En 2013, les œuvres du céramiste majorquin Miquel Barceló ont été mises en scène autour de cayrous de la briqueterie dans le cadre de l’exposition temporaire « Terra Ignis » du Musée d’Art moderne de Céret (Musée de France).

Enfin, en 2016, la Maison du patrimoine de Céret a proposé une exposition et des ateliers artistiques sur l’art populaire des corniches peintes dans les Albères, le Vallespir et les Aspres suite à une expérimentation menée à la briqueterie et à l’adaptation d’une présentation plus ancienne : celle de em>« L’art popular de les teules pintades a Catalunya occidental als segles XVIIe, XVIIIe, XIXe » alors proposée à la Casa pairal, le musée des arts et traditions populaires de Perpignan.

 

 

Les actions de valorisation

 

● Les salons professionnels et autres

La briqueterie participe à des actions de valorisation de son savoir-faire dans des salons comme la Journée des métiers d’art qui a eu lieu à Saint-Cyprien en 2015 ou des événements sportifs locaux qui se concluent par la visite des locaux (Boucle Saint-Jeannaise, randonnée gourmande annuelle).

L’image du cayrou est ainsi liée à celle du territoire. En témoigne le tissu des Toiles du Soleil spécialement créé par l’entreprise artisanale concernée pour la commune qui reprend, entre autres teintes représentatives, celle de l’ocre pour évoquer « les couleurs très nuancées des cayrous ».

● Médias

Depuis les années 1970, l’entreprise a fait l’objet de divers reportages de presse écrite, télévisés ou radiophoniques.

Actions de valorisation à signaler

● Les visites guidées « Rendez-vous à la fabrique »

Depuis 2016, les guides-conférencières du Pays d’Art et d’Histoire Les vallées catalanes du Tech et du Ter s’associent aux briquetiers afin de proposer des visites guidées thématiques, au départ bilingues, intitulées « Rendez-vous à la fabrique » dans l’objectif de valoriser ce patrimoine industriel et ce savoir-faire unique sur le territoire.

● Le projet territorial de Centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine (CIAP). Prévu pour être opérationnel en 2020, ce réseau de 11 lieux sera axé sur la découverte du patrimoine local à l’échelle transfrontalière. Le patrimoine industriel et artisanal y sera représenté.

 

 

Modes de reconnaissance publique

 

En 2004, la briqueterie Sainte-Marcelle a été mise à l’honneur par la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) du département parmi quinze entreprises centenaires.

L’entreprise est située sur le territoire du Pays d’Art et d’Histoire Les vallées catalanes du Tech et du Ter. Ce premier pays transfrontalier du réseau national comprend 31 communes dont 24 françaises.

Une demande de labellisation au titre d’Entreprise du patrimoine vivant est en cours de réflexion.

Le Pays d’Art et d’Histoire transfrontalier Les vallées catalanes du Tech et du Ter, par ses missions et son expérience, est la structure appropriée pour projeter et mettre en œuvre la sauvegarde de l’élément en partenariat avec les groupes concernés : briquetiers, usagers divers et organismes partenaires.

Un Centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine (CIAP) est en cours de création par cette structure, qui prévoit un espace d’exposition permanente de 380 m², dont une partie sera consacrée au patrimoine culturel immatériel. Lieu permanent de réflexion et de médiation sur l’élément et ses évolutions, il inclura aussi un espace d’expositions temporaires et un centre de ressources.

 

● Documenter et diffuser les ressources

La collecte de ressources sur le savoir-faire de la terre architecturale se poursuivra notamment par l’inventaire des éléments architecturaux ou artistiques remarquables sur le territoire. Cette documentation complémentaire sera constituée avec l’aide des structures culturelles comme des musées d’art mais également avec un appel à contribution diffusé sur les réseaux sociaux. Une partie de cette documentation, notamment les archives de l’entreprise (qui peuvent constituer un sujet d’étude historique pour un étudiant) sera numérisée. Ces ressources constitueront une partie de la matière première nécessaire pour le projet d’application mobile du Pays d’Art et d’Histoire. Mis en place dans le cadre du projet Patrimcat (dispositif territorial de valorisation avec un financement européen POCTEFA 2014-2020). Cet outil de diffusion patrimoniale, ludique et documenté, a pour objectif d’accompagner la découverte sous forme d’itinéraires thématiques valorisés par le biais de la Réalité augmentée. L’inventaire et un itinéraire sur la terre cuite feront partie des éléments intégrés. Ils seront enrichis d’un approfondissement de l'enquête de terrain.

Ces actions pourront être menées dans le cadre des conventionnements déjà amorcés avec les universités comme l’UPVD (Perpignan) ou des organismes de recherche tels l’ICRPC (Institut Català de Recerca en Patrimoni Cultural) ou le GARAE (projet Groupement d’intérêt scientifique « Patrimoines en partage »).

 

● Éduquer le regard sur un savoir-faire vernaculaire

La sensibilisation sur ce savoir-faire tend à valoriser les usages de la pratique dans toute leur diversité.

Ainsi, un livret expliquant à la fois l’historique ainsi que les modes de fabrication et d’usage de la brique traditionnelle locale associé à un itinéraire des éléments les plus remarquables du territoire permettra d’éduquer le regard du grand public sur les spécificités de l’architecture vernaculaire. Une exposition virtuelle viendra compléter cette édition.

Des actions à destination des enfants, dans le cadre scolaire, périscolaire ou familial, seront mises en place. La proposition de visites guidées peut être intensifiée avec la mise en place d’actions de médiation complémentaire comme des ateliers pédagogiques de manipulation de l’argile mais également de décoration de la terre cuite à la manière des corniches anciennes. Un livret pédagogique complémentaire de la collection « Les petits détectives du patrimoine » sur la même thématique sera créé à destination des 8-12 ans.

Une formation spécifique sera proposée à destination des professionnels du patrimoine, en particulier des médiateurs et des guides-conférenciers, qui sont souvent les premiers vecteurs entre le bâti quel qu’il soit et le public. Cette formation et la programmation de conférences permettront d’élargir la connaissance sur des sujets qui ne relèvent pas des programmes universitaires classiques.

La diffusion de ce savoir, souvent oublié, peut également concerner les maîtres d’œuvre et les professionnels comme les architectes. Des journées d’étude sur les techniques de restauration spécifique du bâti traditionnel couplées à des formations pratiques (manipulation de la chaux par exemple) peuvent être organisées à l’image des actions du GRETA (Grup de Recuperació i Estudi de la Tradició Arquitectònica). Cet organisme, créé en 2015 à Figueres, en Catalogne du Sud, est notamment composé d’architectes et d’historiens. Il a pour objectif principal l’étude et la sauvegarde d’une architecture traditionnelle ici qualifiée d’« anonyme » car méconnue. Cette association fait partie des partenaires potentiels dans ce projet à l’instar des organismes français de conseil en architecture ou de valorisation patrimoniale du territoire comme la CRMH, le CAUE66, le Canigó Grand Site ou espagnols tel l’Observatori del paisatge de Catalunya (observatoire du paysage).

 

● Valoriser la connaissance des matériaux et des techniques traditionnelles

La sauvegarde de la pratique passe également par la mise en valeur des métiers du bâtiment. Des stages de sensibilisation à la pose avec des matériaux traditionnels pourront être mis en place à l’initiative des organismes de formation concernées. Ces stages pourront s’adresser non seulement aux professionnels du bâtiment mais également à des particuliers. Un partenariat pourra également être amorcé avec le lycée des Métiers du Bâtiment de Villelongue-dels-Monts dans l’objectif de valoriser l’utilisation des briques traditionnelles à destination de futurs professionnels. La pérennité d’une fabrication à l’ancienne passe aussi par la formation de nouveaux patriciens qui peut se faire en lien avec les centres de formation à l’apprentissage, participant ainsi à la revitalisation de ce secteur.

 

● Diversifier pour favoriser échanges et créativité

Depuis le début du XXe siècle, la briqueterie, le lieu lui-même comme ses fonctionnalités, est liée à la vie artistique locale. Ce lien peut être valorisé par la mise en place d’expositions temporaires d’œuvres in situ ou dans différentes galeries ou musées. Des partenariats avec des céramistes, du territoire et au-delà, permettra d’exploiter le potentiel de cuisson et de valoriser l’image de la fabrication.

Enfin, une coopération peut être envisagée avec d’autres entreprises du secteur dans l’objectif d’échanger sur les pratiques et de créer des vecteurs de diversification. La ville de La Bisbal d’Empordà, l’un des centres de poterie les plus actifs de Catalogne, fait partie des lieux pressentis. D’autres usines de fabrication traditionnelle comme celle des Toiles du Soleil de Saint-Laurent-de-Cerdans constituent des collaborateurs potentiels. En effet, cette dernière officie dans le cadre de projets d’architecture intérieure : les matériaux traditionnels de terre cuite ainsi que la possibilité du sur-mesure de la briqueterie Sainte-Marcelle permettent une ouverture vers cette orientation qualitative.

Récits liés à la pratique et à la tradition

 

La famille de briquetiers exprime un fort attachement à la pratique et à sa continuité dans l’histoire. La gérante, Marcelle Denaclara, a effectué il y une quinzaine d’années des recherches généalogiques et conserve toutes les archives de l’entreprise qui serait la plus ancienne du département à exercer la même activité depuis son origine.

Cette histoire est régulièrement mise en valeur dans le cadre d’éditions dans la presse locale ou dans des ouvrages rédigés par des historiens locaux. Ainsi, en 1979, L’Indépendant consacre deux articles au savoir-faire et au renouveau du cayrou. En 2003, un autre article du quotidien titre : « Le Monument historique de l’industrie locale ». Le déroulement de la fabrication et l’histoire de l’entreprise, issus du témoignage direct de ses praticiens, sont aussi détaillés dans les livres de Pierre Cantaloube et Jean Rifa ou encore dans un article de la revue Terres catalanes.

● CANAL Sandra, « L’antre du cairou catalan », Terres catalanes, n° 37, sept. /oct. /nov. 2004, p. 78-85.

● CANTALOUBE Pierre, Saint Jean Pla de Corts et le Tech, Série le Tech et ses franchissements, Saint-Estève, Presses littéraires, 2002, p. 220-230.

● RIFA Jean, Femmes et hommes du Roussillon, Perpignan, Trabucaire, 2011, p. 111-113.

 

Le récit familial

 

Ce récit raconté par les briquetiers retrace la tradition d’une fabrication transmise d’une génération à l’autre depuis le XVIIIe siècle et lie la création de l’entreprise moderne des années 1920 à une histoire de rencontre. Ainsi, Marcelle Colomines aurait remarqué un jeune homme « bien mis » près de la gare, un certain Jean Fite, qui l’aurait demandé en mariage six mois après. De cette union, naîtra une grande briqueterie sur les terres de la famille de la jeune femme et un rayonnement commercial à travers le choix d’une marque inspirée de son prénom. Participe à cette visibilité l’imposante cheminée de l’entreprise mentionnée comme étant l’« obélisque » souhaitée par le grand-père.

 

Le rôle des artistes

 

« On a eu la chance d’avoir de la bonne terre. » Jean Fite

Si l’histoire de la rencontre est souvent contée, il en est de même pour la participation de l’entreprise à la créativité d’artistes parfois de renommée internationale.

La commune de Saint-Jean-Pla-de-Corts est située à quelques kilomètres de celle de Céret, fortement liée à la création et à diffusion de l’art moderne et contemporain. Cette proximité, liée à la qualité de l’argile locale et à la possibilité d’une cuisson à haute température, auraient attiré, selon Jean Fite, des artistes comme Mario Vivès, Marcel Homs, Marcel Gili, Peter Weiss mais aussi Aristide Maillol, Gustave Violet, Jean Lurçat et même Picasso.

Il est vrai que la plupart de ces artistes, originaires ou non de la région, y ont séjourné, créé et y ont parfois fini leurs jours. Certaines de leurs œuvres d’art en céramique sont encore conservées et exposées au Musée d’Art moderne de Céret comme celles de Manolo Hugué, dit Manolo, qui a vécu à Céret dans les années 1910-1920, ou celles de Picasso. Ce dernier est venu plusieurs fois dans le département notamment à la Casa Sant Vicens dans les années 1950 à l’invitation de Jean Lurçat. Ce centre de céramique d’art est un véritable creuset de création imaginé par Firmin Bauby dans les années 1940. À partir de 1951, Jean Lurçat, qui s’initie alors à l’art de la céramique, y passe tous les étés jusqu’à sa mort en 1966. Il y convie de nombreux artistes de réputation internationale. Afin de compléter sa fourniture en terre, le centre d’art s’est approvisionné dans les années 1960-70 à Sainte-Marcelle en terre non laminée qu’elle broyait et mélangeait avec de la terre plus fine.

Comme le mentionne des artistes plus contemporains, la qualité de l’argile, pas assez malléable, ne permet pas un modelage direct mais le potentiel de cuisson dans un four de grandes dimensions est d’intérêt.

Ainsi, Gustave Violet, dont l’œuvre diverse est majeure, est l’un de ceux dont le rapport direct avec la briqueterie est attesté. Alors qu’il installe son atelier à Céret, et avant la construction de son propre four, il utilise celui de la tuilerie pour y cuire des œuvres. Marcel Gili, qui travaille par la suite avec Maillol, est pour un temps son élève. Avec lui, il co-réalise en 1934 la frise allégorique du fronton de la piscine Alfred Nakache de Toulouse (inscrit MH 1993, Label Patrimoine XXe). Trois ans plus tard, est inauguré à Céret le Monument aux créateurs du canal d’arrosage, dont les bas-reliefs en terre cuite originaux (inscrits MH) sont conservés dans le hall de la mairie de Céret. En parlant du réalisme des créations de Gustave Violet, le poète Joseph-Sébastien Pons parle de « poème de la terre » et d’ «œuvres (…) modelées selon la terre, qu’on sente en elles la flore qui nous entoure, les nœuds des ceps, la saveur fraîche des figues ; qu’elles soient droites, profondément enracinées dans notre sol comme l’écarlate et sombre chêne-liège ou l’olivier devant la mer latine et qu’elles possèdent leur vigueur et leur pureté sur l’horizon. »

● PONS Joseph-Sébastien, « L’art du sculpteur céramiste Gustave Violet », La Veu de Canigou, n° 90, 1914, p. 225-236].

Des œuvres artistiques, issues des différentes cuissons, et données en remerciement par leurs créateurs, sont, en partie, conservées dans le bureau, mêlées de manière hétéroclite aux modèles fabriqués et aux archives de l’entreprise. On y trouve notamment des moulages de visages des briquetiers ou de leurs proches par Pascale Aguilhon ou des représentations religieuses. À l’intérieur même de la briqueterie, une Vierge de terre cuite est installée en hauteur, sur une poutre, dans une vocation de protection. Les briquetiers eux-mêmes relaient les croyances, notamment populaires, liés à l’activité.

 

Les croyances populaires

 

« Je suis né le jour de la Saint-Vincent » Franck Denaclara

Fêté le 22 janvier, saint Vincent est le patron de tous les métiers liés au vin. D’après Joan Amades, un folkloriste catalan des années 1950, il serait le « fill dels amors d’una teuleria » (le fils des amours d’une tuilerie) et aurait lui-même exercé le métier : il est également le patron des tuiliers et des briquetiers. Ces derniers peuvent aussi vénérer saint Martin, fêté le 11 novembre, patron de tous les fours de cuisson. Joan Amades recense dans son « Costumari català »< /em> certaines croyances populaires liées à l’activité de la terre cuite. Ainsi, les feux allumés le mercredi permettraient une production plus homogène. La meilleure période pour collecter et travailler la terre serait le mois de mai : « pel mes de maig la terra i el foc es casen » (au mois de mai, la terre et le feu se marient). La production de ce mois serait aussi d’une meilleure qualité et d’une résistance supérieure. En revanche, les feux ne doivent pas être allumés avant la Sainte-Croix (alors le 3 mai), car cela porterait malheur.

C’est également le feu entretenu par le tuilier qu’évoque Louis Codet, écrivain originaire de Perpignan, dans son conte intitulé « Le tuilier de Finestret », paru dans la revue hebdomadaire Les nouvelles littéraires artistiques et scientifiques du 12 avril 1924 : il « allume le feu, en retire les branches enflammées, les replace au bon instant pour que le feu soit continu et tendre qui donne à l’argile la couleur des glycines et des oranges, des braises et des roses ». À l’instar de ce qui se pratiquait alors, le tuilier évoqué exerce plusieurs métiers. C’est ce que le briquetier actuel raconte aussi, évoquant un travail familial : l’homme aux travaux de force et son épouse au moulage. Les tuiles, dit-on, étaient façonnées par les femmes, leur cuisse recouverte d’une toile de jute servant de gabarit.

La fabrication mais également l’utilisation des produits de terre cuite font l’objet de récits ou de croyances, en particulier celles liées à différents éléments de toiture présents dans les villages et dans les bourgs : corniches maçonnées, épis de faîtage et même tuiles gravées.

Les débords de toiture peuvent se présenter sous forme de corniches maçonnées de composition simple ou plus ouvragée. Si elles ont pour vocation de protéger contre les intempéries, ces corniches peuvent aussi être ornées de différents motifs avec des peintures à la chaux. L’usage de cette décoration peinte se perd à la fin du XIXe siècle avec l’apparition des corniches préfabriquées. Le savoir-faire a disparu, la mémoire collective ayant elle-même à peine retenu la technique de la décoration jusqu’à sa signification. Il existe trois hypothèses de fabrication recensées par le briquetier : la peinture avant la cuisson, juste après la cuisson (la chaleur permettant alors une meilleure incorporation de la chaux) ou au moment de la réalisation de la toiture. Cette dernière aurait été la plus utilisée : les ouvriers eux-mêmes trempaient successivement deux des angles des carreaux de terre cuite dans un bac de chaux vive afin de créer le décor le plus fréquent en forme de triangle. L’importance et la diversité de ce décor mais aussi sa composition et sa dimension seraient le reflet de la position économique et sociale du commanditaire. Outre l’aspect esthétique, témoin d’un imaginaire populaire, ces décorations auraient aussi pour fonction de protéger la maison et ses habitants.

Comme ces ornements, les gravures présentes sur certaines tuiles anciennes présentes sur les toitures seraient aussi le fait des ouvriers qui signeraient là la fin de la construction par ce décor de protection. Cette pratique répond à celle d’un élément également décoratif situé soit sur le mur pignon soit sur une cheminée sous forme d’une ou plusieurs tuiles découpées et retournées pour former un épi en 2 ou 3 pointes. Communément appelés « espante bruixes » (littéralement « éloigne sorcières »), « banyes de bruixes » (cornes de sorcière), « cue de gall » ou « cap de gall » (queue ou tête de coq), ces éléments auraient pour mission d’éloigner les mauvais esprits et d’assurer la prospérité des habitants. De même, l’habitude de fin de chantier qui consiste à placer un bouquet sur la cheminée d’une toiture a pu se conserver jusqu’à la fin des années 1980. Ces pratiques auraient progressivement disparu depuis les années 1950 mais ces éléments de terre cuite restent encore très présents sur les toitures et dans l’imaginaire local.

 

 

Inventaires réalisés liés à la pratique

 

● MnÉmosyne, « Toits pyrénéens, une mosaïque de couleurs, La couverture terre cuite traditionnelle », CAUE, 2004.

La briqueterie a participé à un travail d’identification et de transmission mené par le CAUE dans le cadre d’une enquête de terrain dans un objectif de sensibilisation du public à la conservation de la richesse patrimoniale des Pyrénées, de celle des savoir-faire traditionnels du bâtiment en particulier.

● FOULQUIÉ Charles, Mémoire de stage, 1e année Arts et métiers ParisTech, 2010.

Dans le cadre de ses études, l’un des membres de la famille a effectué un stage et décrit le fonctionnement technique et humain de l’entreprise.

● RUINET Mathilde, « Les savoir-faire patrimoniaux en Pays Pyrénées-Méditerranée », Rapport de stage, Master 2 VMP Université Paul Valéry-Montpellier III, septembre 2008.

Vingt-six entreprises, dont la briqueterie, ont été inventoriées dans le cadre de cet inventaire.

● Collectif, sous la direction d’Esteban CASTANER-MUNOZ et de Virginie SOULIER, « Exposer l’industrie de la Catalogne française », Perpignan, Trabucaire, 2016.

Un travail d’inventaire du patrimoine industriel et des sites concernés, dont celui de la briqueterie, a été mené en 2016 dans le cadre préalable d’une exposition réalisée par des étudiants du Master 2 professionnel « Gestion, conservation et valorisation du patrimoine territorial » de l’Université de Perpignan.

● En 2017-2018, le savoir-faire de la terre cuite a également fait l’objet d’un travail d’inventaire mené sur le territoire du PAH par les étudiants de l’Université de Perpignan dans le cadre d’un projet tuteuré dirigé par Esteban Castaner-Munoz.

● Le thème du patrimoine industriel territorial sera également abordé dans le cadre de l’Inventaire général du patrimoine culturel mené en partenariat avec la Région Occitanie.

 

 

Bibliographie sommaire

 

Ouvrages imprimés

 

AMADES, Joan, Costumari català, El curs de l’any, volum 1, hivern, Barcelona, Salvat Editores, Edicions 62, 1982 (réédition 1952), p. 578-579.

CASTANER-MUNOZ, Esteban, Perpignan, 1848-1939, la cité et les architectes, Lyon, Lieux dits, 2013.

Collectif, Patrimoines industriels en Roussillon, rétrospective d’une société en mutation, Perpignan, Trabucaire, 2013, p. 25.

Collectif, Pyrénées-Orientales, Roussillon, Condé-sur-Noireau, Bonneton, 2000, p. 132-133.

DUHAMEL DU MONCEAU, Henri-Louis, L’Art du tuilier et du briquetier par MM. Duhamel, Fourcroy et Gallon, 1763.

GUIBAL, Jean, RAULIN, Henri, L’Architecture rurale française, Languedoc-Roussillon, Éditions A. Die, 1994, p. 75-83.

LHUISSET, Christian, L’Architecture rurale en Languedoc-Roussillon, Perpignan, Trabucaire, 2013 (rééd. 1980), p. 328.

MORIN, Bruno, L’Habitat traditionnel des Pyrénées catalanes. Le connaître et le restaurer, Loubatières, 2014.

PEIRS, Giovanni, La Brique. Fabrication et traditions constructives, Marsat, Eyrolles, 2004.

SANGLA, Marie-Hélène, L’Invention d’une Méditerranée, patrimoine, création, identité en Roussillon de la fin du XVIIIe siècle à l’entre-deux-guerres, Saint-Estève, Presses Universitaires de Perpignan, 2016.

VALAISON, Marie-Claude et François, GREIVELDINGER, Aurélia, Pyrénées-Orientales, 100 lieux pour les curieux, Baumes-les-Dames, Éditions BONNETON, 2011, p. 174-175.

 

Articles de revues

 

DELONCLE, Joseph, « L’art populaire des briquetiers décorateurs en Catalogne occidentale », Reflets du Roussillon, n° 52, 1965, p. 18-23.

COLLECTIF, Monuments historiques, Le patrimoine en brique, n° 185, 1993.

MAS-CHANCEL, Édouard, « L’âme catalane du Roussillon », Lo mestre d’obres, n° 17, 1935, p. 5.

MAYEUX Albert, « Saint-Jean-le-Vieux à Perpignan », Bulletin monumental, Caen, 1913.

NOELL, Francis, « L’architecture vernaculaire dans les Pyrénées-Orientales ou l’architecture paysanne en pays catalan », Architecture, archéologie et patrimoine du Roussillon, Société agricole, scientifique et littéraire (des Pyrénées-Orientales), CXXIVe vol., 2017, p. 9-106.

PASQUET, Lazare, « Quelques traits caractéristiques des maisons de pays en Pyrénées-Orientales », Maisons paysannes de France, n° 119, 1996, p. 6-9.

 

 

Filmographie sommaire

 

Teuleria tradicional, Viure al país, réalisé par Martina Camiade, produit par France 3 Sud, 1997, 20’ (en catalan)

● Descorbeta Sainte-Marcelle : harmonia dels 4 elements, Viure al país, réalisé par E. Panadès, C. Paquier, P. Ferrasse, J. Monastier, M. Milhorne, produit par France 3 Sud, 2006, 7’43 (en catalan)

Le dernier briquetier des Pyrénées-Orientales, « Météo à la carte », Le Mag, produit par France 3, janvier 2017, 5’43

www.youtube.com/watch?v=1WBD0HqIOYI  [consulté le 05/03/2019]

www.youtube.com/watch?v=VgYZw4h1P9w  [consulté le 15/03/2019]

● Regarde, Xavier Mateú, © Barclay, 2018, et Mon ange, Xavier Mateú, © Barclay, 2019

Clips en partie tournés à la briqueterie :

www.youtube.com/watch?v=hspd6sLGJ9w[consulté le 05/03/2019]

www.youtube.com/watch?v=VgYZw4h1P9w[consulté le 15/03/2019]

 

 

Sitographie sommaire

 

● Briqueterie Sainte-Marcelle

www.ste-marcelle.fr

● Patrimoines d’Occitanie, Pays d’Art et d’Histoire Les vallées catalanes

Rubrique « Lumière sur la briqueterie » :

http://patrimoines.laregion.fr/no_cache/items-globaux/detail

article/index.html?tx_ttnews%5Btt_news%5D=2214&cHash=b5bf353782bdb80e9e6ee98ab6a6eaac

● Institut national des métiers d’art

www.institut-metiersdart.org/metiers-art/fiches-metiers/architecture-et-jardins/briquetier

● Centre technique des matériaux naturels de construction

www.ctmnc.fr

● Fédération française des tuiles et briques

www.fftb.org

● École supérieure d’art et de design Marseille

Photo-reportage de Suah Ars :

suahars.wordpress.com/2018/01/18/briqueterie-sainte-marcelle/

Les détenteurs de la fabrication

 

strong>Briqueterie Sainte-Marcelle

● DENACLARA, Franck (briquetier, gérant)

● DENACLARA, Marcelle (gérante)

● ETOGO BESSALA, Félix (ancien « manœuvre à la briqueterie »)

● QUESADA, Antoine (briquetier, contremaître)

● ORTEGA, Louis (briquetier, ouvrier)

1 rue de la Briqueterie, 66490 Saint-Jean-Pla-de-Corts / 06 72 48 67 61 / contact@ste-marcelle.fr / www.ste-marcelle.fr

● CARRÈRE Jean-Baptiste (neveu des gérants), 27 rue de la République, 66400 Céret / 06 18 18 71 64 / jbcarrere66@hotmail.fr

● FITE, Jean (ancien briquetier, gérant, « mémoire » de l'entreprise), 1, rue de la Tranquillité, 66490 Saint-Jean-Pla-de-Corts / 04 68 83 10 47

 

Les utilisateurs

 

>CAUE 66 - Conseil en architecture

● VALLIÈRE, Stéphane (directeur, architecte-conseil), 11 rue du Bastion Saint-François, 66000 Perpignan / 04 68 34 12 37 / contact@caue66.fr  / www.caue66.fr

Architecte

● NOËLL, Olivier (architecte DPLG), 13 rue des Coquelicots, 66680 Canohès / 06 83 39 78 76 / oliviernoell@architectes.org

 

Entreprises de maçonnerie

 

● NOËLL, Francis (ancien entrepreneur, spécialiste restauration et maçonnerie traditionnelle), 13 rue des Coquelicots, 66680 Canohès / 04 68 55 05 79

● PLANELL, Yvan (entrepreneur), Vallespir Construction, route d’Espagne, 66230 Prats-de-Mollo-la-Preste / 04 68 39 72 04 / vallespir.construction@orange.fr  / www.vallespir-construction.fr

 

Mairie

 

● ANDRODIAS, Michel (premier adjoint en charge urbanisme)

● BARBOUTY, Dominique (quatrième adjointe en charge culture et cadre de vie)

Square Guy Malé, 66490 Saint-Jean-Pla-de-Corts / 04 68 83 17 64 / contact@stjeanpladecorts.fr  / www.saintjeanpladecorts.fr

 

Les « créateurs »

 

● AGUILHON, Patricia (plasticienne), 20 Chemin del Vives, 66000 Perpignan / 06 25 37 40 54 / pascale.aguilhon@gmail.com  / http://pascale-aguilhon.blogspot.com /

● GORRÉE, François (« passionné », fondateur de l'A.P.L.E.C. ou association de libération du cayrou), Camí Sola de Cogul.lera, 66150 Arles-sur-Tech / 04 68 39 02 15 / marianne66@wanadoo.fr

● SANT VICENS (atelier de céramique d'art), 40, rue Sant Vicens, 66000 Perpignan / 04 68 50 02 18 / bauby@wanadoo.fr  / www.santvicens.fr

 

Soutiens et consentements reçus

 

Le projet d’inventaire mené par le Pays d’Art et d’Histoire transfrontalier Les Vallées catalanes du Tech et du Ter et sa méthodologie ont été présentés aux gérants actuels de la briqueterie Sainte-Marcelle. Le suivi de l’inventaire a été fait en collaboration avec l’un des membres de la famille Fite-Colomines, qui a activement participé à sa réalisation, notamment en fournissant et complétant les informations et en procédant à la relecture de la fiche. Divers entretiens, visites et observations ont été réalisés au sein de l’entreprise, qui a ouvert ses portes à différentes périodes des étapes de la fabrication. La recherche s’est ensuite étendue à d’autres praticiens concernés dont certains représentants ont été interviewés. Ainsi, chaque groupe concerné a rédigé une lettre de soutien au projet : représentants des briquetiers, des architectes et du conseil en architecture, des entreprises de maçonnerie et des artistes.

 

Lettres recueillies :

 

● Pascale AGUILHON, plasticienne, Perpignan, 11 février 2019

● Dominique BARBOUTY, adjointe au maire de Saint-Jean-Pla-de-Corts, Saint-Jean-Pla-de-Corts, 4 février 2019

● Jean-Baptiste CARRERE, neveu des gérants actuels de la briqueterie, [février 2019]

● Marcelle FITE-DENACLARA, gérante actuelle de la briqueterie, [février 2019]

● Olivier NOËLL, architecte DPLG, [février 2019]

● Stéphane VALLIERE, directeur du CAUE 66, Perpignan, 18 février 2019

Rédacteur(s) de la fiche

 

NAU, Christelle

Chargée de mission PCI

Pays d’Art et d’Histoire transfrontalier Les vallées catalanes du Tech et du Ter 7, place Le Foiral

66230 Prats-de-Mollo-la-Preste

04 68 83 99 49 / contact@valleescatalanes.org / www.valleescatalanes.org

Enquêteur(s) ou chercheur(s) associés ou membre(s) de l’éventuel comité scientifique instauré

 

Pôle Inventaire du Pays d’Art et d’Histoire transfrontalier (PAHT) Les vallées catalanes du Tech et du Ter

● GREIVELDINGER, Aurélia, directrice, animatrice du patrimoine

● NAU, Christelle, chargée de mission PCI

● PEDROSA, Clara, chargée d’inventaire et de documentation

 

Membres du Comité scientifique associé

● VOISENAT, Claudie, anthropologue, Institut interdisciplinaire d’anthropologie du contemporain, UMR 8177, CNRS/EHESS

● CASTANER-MUNOZ, Esteban, professeur des universités en histoire de l’art moderne et contemporain à l’UPVD, directeur adjoint du CRESEM (Centre de Recherches Historiques sur les Sociétés et Environnements Pyrénéens).

 

Lieux(x) et date/période de l’enquête

 

Saint-Jean-Pla-de-Corts et autres communes des Pyrénées-Orientales, octobre 2017-février 2019

 

 

Données d’enregistrement

 

Date de remise de la fiche : 14 mars 2019

Année d’inclusion à l’inventaire : 2019

N° de la fiche : 2019_67717_INV_PCI_FRANCE_00431

Identifiant ARKHark:/67717/nvhdhrrvswvk2mg

Comment contribuer à l'inventaire : la méthode : http://pcilab-new.huma-num.fr/ 

Contribuer Accéder à la fiche sur Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Terre_cuite

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